Dire que la diversité culturelle et ethnique en Mauritanie est une valeur dépréciée, revient à enfoncer des portes ouvertes. Tout le monde le sait, tout le monde en souffre, mais personne ne songe à imaginer autre chose. Notre logiciel est victime d'un énorme bug dans ce domaine, qui ne semble pas prêt de vouloir se régler. J'estime pour ma part, que l'une des méthodes pour faire repartir notre programme de société, est de commencer à défendre l'intérêt de nos populations où qu'elles se trouvent.

Il est vrai que le lourd dossier du passif humanitaire, a réussi à être porté à la connaissance du grand public Mauritanien, en dépit de la réticence que pouvait en avoir le régime militaire. Il faut aussi admettre qu'il aurait été difficile pour ces derniers, de cacher les conséquences d’événements réels (1989), qui ont bien eu lieu en Mauritanie.
La question des séquelles de l'esclavage et des corrections concrètes à apporter, pour promouvoir une véritable égalité et un semblant d'équité vis-à-vis des individus et des groupes, qui ont eu à subir les affres de l'esclavage ou de la discrimination sur notre territoire, n'est toujours pas abordée de manière constructive. Néanmoins, elle demeure sur le devant de la scène, grâce à l’infatigable nouvelle figure de proue de ce mouvement : " Biram Dah Ould Abeïd".
Toutes ces questions et d'autres que je ne soulèverais pas ici, pour des raisons de concision, sont internes à notre corps social et doivent trouver des solutions durables, par leur immixtion dans le débat public. La question Peule, est une interrogation bien plus vaste, car comme vous le savez sans doute, il s'agit d'un peuple dont la présence peut aisément se répartir sur toute l'Afrique de l'ouest et se retrouver jusqu'en Afrique centrale.
En Mauritanie, je nous targue d'avoir la meilleure branche de ce grand peuple Peul. D'abord, parce que cette dernière s'inscrit au sein de notre nation, comme une communauté exigeante, qui par ses remarques et revendications ainsi que par la nature de ses combats politiques, oblige les autres communautés à se poser des questions, à apporter une contradiction, des nuances, voire des contres-propositions. Ensuite, parce que par sa simple présence parmi nous, elle a manifesté un choix ambitieux et audacieux, celui de vivre et d'envisager l'avenir avec d'autres communautés que la sienne. Finalement, parce qu'il est important de se souvenir de la contribution historique, que ce grand peuple a consenti pour la propagation de l'Islam en Afrique.
Maintenant, venons-en au nœud de notre sujet, ce qu'il faut entendre par la question peule.
Il s'agit d'une interrogation, sur un silence pesant, inexpliqué et gênant.
Celui qui entoure le traitement des populations peules en Centrafrique, au Mali et au Cameroun. Le président Ibrahim Boubacar Keita, avait joliment éludé cette question soumise par un journaliste, lors de sa visite au sommet de l'union africaine, qui s'était déroulé dans notre pays en juillet dernier.
Sans vouloir polémiquer ou m'aventurer de façon frivole sur un terrain glissant, il m’apparaît nécessaire que le gouvernement Mauritanien se positionne clairement sur ce sujet. Dans le but de provoquer ne serait-ce qu'une discussion, afin d'en savoir plus et pourquoi pas de lancer des investigations. Ce qui est certain, c'est que tout ce qui peut être entrepris politiquement et diplomatiquement, pour sauver des vies et préserver l'intégrité d'individus ou de groupes d'individus, sur le continent Africain, doit toujours être tenté.
La Mauritanie s'honorerait d'incarner cette vision, sans craindre que la politesse lui soit rendue par un voisin proche ou lointain. Car les prémisses d'une véritable entraide, commence par le respect. Nous ne venons pas pour réclamer des comptes ou faire de la morale, mais pour apaiser, réconcilier et éviter l'irréparable.