Sans vouloir faire de fausse ironie, l'annonce de la prochaine concertation nationale m'évoque un peu le congrès d'Aleg. Ce désir affiché de vouloir atteindre un consensus sur des questions fondamentales, résonne un peu comme une mise à plat des engagements de tous les acteurs d'une société. Nous avons peut-être une chance, une occasion historique pour notre génération, de fonder un véritable pacte social, qui reflète ce que nous sommes, ce que nous voulons être, comment nous voulons vivre et ceci à bonne distance des influences extérieures d'où qu'elles puissent venir et qui aille dans le sens bien compris de nos intérêts.

D'une durée de 6 semaines, ce grand débat va recouvrir des thématiques aussi complexes que le processus démocratique, la bonne gouvernance, la lutte contre la gabegie, la réforme de la justice, la réforme de l'administration, le foncier rural, etc.
En Mauritanie, ce sont les gens au pouvoir, des militaires pour la plupart, qui consentent magnanimement à ouvrir le dialogue avec une classe politique amorphe et aphone.
Celle-ci, reconnaissant la main tendue pour ce qu'elle est une occasion d'exister et de peser réellement dans le jeu démocratique, saute sur cette opportunité qui lui est offerte.
Elle ne se plaindra sans doute pas, du temps qui lui est imparti pour creuser toutes ces questions hautement sensibles. Elle ne demandera pas à faire venir nos meilleurs experts sur les sujets à l'ordre du jour, ou de faire participer notre société civile qui parfois, trop souvent, réalise le travail de l'état sur le terrain, auprès de nos concitoyens, dans la vraie vie.
Elle n'inclura vraisemblablement pas l'audition de témoins dans le dossier du règlement des problèmes de droits humains, autrement dit l'esclavage et le passif humanitaire.
En utilisant une formulation comme "concertation nationale inclusive", on véhicule des idées bien précises sur le résultat escompté et le sérieux de la démarche entamée.
Une concertation est un débat, un échange d'arguments où l'on doit prendre en considération les divers points de vue exprimés pour en faire émerger l'intérêt général, en amont de la mise en forme d'une proposition et avant de s'accorder sur un projet commun.
La concertation est donc différente de la négociation, parce qu'elle n'aboutit pas forcément à une décision, elle vise plutôt à en préparer le terrain.
La concertation est aussi différente de la consultation, qui se résume à demander un avis en général, avis qui ne lie d'ailleurs pas le destinataire de la consultation. Enfin, la concertation se distingue de la médiation, parce qu'elle ne fait pas intervenir un tiers, pour faciliter la recherche d'un accord entre les parties.
En ajoutant les adjectifs qualificatifs "nationale" et "inclusive" au mot concertation, on veut renforcer et fixer l'idée que toute la nation est concernée et que personne n'est exclu.
C'est une très grande ambition qui mérite du temps, de l'expertise, une participation réelle des acteurs, une transparence totale du processus et la retransmission en direct des débats à la télévision nationale accessible en toutes les langues.